mardi 27 mars 2012

Des graffitis des déportés à Drancy exposés au Mémorial de la Shoah



Des graffitis gravés ou écrits par les juifs internés à la Cité de la Muette à Drancy (Seine-Saint-Denis) avant leur déportation vers les camps de concentration ont été exposés pour la première fois lundi au public, au Mémorial de la Shoah à Paris.

L'exposition baptisée "Les graffitis +Des noms sur des murs+", vise à "les faire vivre, montrer que derrière des murs, derrière des parois, il y a des personnes", a dit Serge Klarsfeld, président de l'Association des fils et filles de déportés juifs de France.

Grâce à cette exposition, "ces gens vont survivre, ils ne vont pas disparaître alors que la volonté des nazis, c'était la disparition des juifs de l'histoire", a-t-il, insisté saluant "un travail archéologique en gros de la mémoire".

Les graffitis avaient été découverts en 2009 par des ouvriers lors de travaux de rénovation de la Cité de la Muette.

Les plus anciens datent d'août 1941, gravés ou écrits au crayon sur des carreaux blancs servant de contre cloison. Une douzaine d'entre eux sont visibles depuis lundi soir dans la crypte du Mémorial de la Shoah.

Sur certaines pierres on peut lire des messages émouvants, comme ce poème du 1er septembre 1942 qui a retenu l'attention des visiteurs: "Je m'en vais vers l'inconnu/En suivant mon destin/Et en laissant tristement ici/Mon bonheur et mes chagrins/La vie fut belle en ce pays/Où je n'ai plus le droit de rester".

"Mon père a été arrêté en 1942, il a été déporté par le convoi numéro deux, ensuite il a été à Compiègne. Donc sur ces panneaux, peut-être, je retrouverai les traces de mon père", a confié Léon Wajsberg, venu avec son épouse.

La restauration a été supervisée par le Conseil général de la Seine-Saint-Denis, avec l'aide de la région Ile-de-France.

"Nous voulons que cette exposition permette de mettre la Seine-Saint-Denis au premier rang de ceux qui refusent et qui veulent combattre le racisme et l'antisémitisme", a lancé Claude Bartolone, précisant que ces graffitis seraient remis ultérieurement aux archives nationales.

Du camp de Drancy, 73.000 Juifs ont été déportés en 62 convois vers Auschwitz.

mardi 6 mars 2012

États-Unis : Anne Frank baptisée par les mormons



Anne Frank est devenue mormone. Vous ne le saviez pas ? Elle non plus. Elle a été baptisée en février à titre posthume par l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours (LDS). Cette congrégation américaine pratique régulièrement le baptême des morts, pour que les non-mormons, explique-t-elle, aient une chance d'être sauvés et d'accéder au royaume de Dieu. Ce qui ne plaît pas du tout à la communauté juive, qui, en 1995, a passé un accord avec l'Église mormone pour que les victimes de l'Holocauste ne soient pas touchées par ces baptêmes par procuration.


Mais apparemment les consignes ne sont pas suivies à la lettre. Et Anne Frank n'est pas la seule concernée. Daniel Pearl, le journaliste du Wall Street Journal capturé et tué au Pakistan en 2002, et les parents du rescapé des camps et chasseur de nazis Simon Wiesenthal ont été eux aussi baptisés récemment. Ce n'est pas la première fois que cette pratique fait scandale : la LDS a déjà baptisé par le passé la mère de Barack Obama, Hitler, Albert Einstein... La cérémonie consiste à immerger dans une baignoire un mormon bien vivant qui est baptisé au nom d'un défunt. Mais, assure l'Église mormone, les morts ont tout à fait le choix de refuser la conversion s'ils le souhaitent.

Cette nouvelle controverse ne fait pas une bonne publicité à Mitt Romney, le favori dans la course à l'investiture républicaine, qui est un mormon pur et dur. Il est resté jusqu'ici très discret sur sa religion, que la droite religieuse conservatrice considère comme une secte d'hérétiques dangereux. Mais Elie Wiesel, survivant des camps et Prix Nobel de la paix, a appelé publiquement Romney à condamner ces conversions. Wiesel lui-même a fait partie d'une liste de candidats potentiels au baptême.
Mormons gays

L'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours vient de publier une lettre rappelant à ses ouailles qu'elles ne devaient pas soumettre au baptême "des noms de groupes non autorisés comme des vedettes ou des victimes de l'Holocauste". Les membres, stipule le règlement, ne doivent demander ces baptêmes que pour leurs propres ancêtres et leurs parents décédés. Dans le cas d'Anne Frank, a expliqué un porte-parole de l'église au New York Times, la demande de baptême a d'abord été refusée par l'ordinateur qui prend en compte les demandes. Mais le demandeur a ensuite falsifié les informations de la jeune fille et trompé ainsi la machine.

Cela a poussé Anthony Hecht, journaliste dans un hebdomadaire de Seattle, à contre-attaquer. Il a créé le site internet AllDeadMormonsAreNowGay.com ("Tous les mormons morts sont maintenant gays"), qui permet de convertir les défunts mormons à l'homosexualité. "Malheureusement, nombre de mormons dans l'histoire sont morts sans connaître les joies de l'homosexualité. Avec votre aide, ces pauvres âmes pourront être sauvées. Entrez simplement le nom de votre mormon défunt favori dans la case ci-dessous et cliquez sur conversion", propose le site. "Aussitôt, ils deviennent gays pour l'éternité. Impossible de revenir en arrière."

De notre correspondante à Washington, Hélène Vissièr. le Point.fr le 06/03/2012

jeudi 1 mars 2012

Le Crif scandalisé par une émission de France Inter

Richard Prasquier, président du Crif, s'est fendu d'une lettre au CSA pour dénoncer des propos supposés antisémites tenus dans l'émission humoristique A votre écoute, coûte que coûte.

Le Crif s'est-il ému trop vite? Son président, Richard Prasquier, a adressé à Michel Boyon, président du CSA, un courrier de protestation. L'objet de son indignation: la diffusion sur France Inter, en début de semaine, dans l'émission A votre écoute, coûte que coûte d'un sujet en forme de sketch qui, à l'évidence, n'est pas passé au sein de cette organisation représentative de la communauté juive. [Cliquer ici pour l'écouter]

On peut y lire: "J'attire votre attention sur l'émission A votre écoute, coûte que coûte (France Inter), dont le numéro diffusé le lundi 27 février, a représenté un festival de tous les clichés antisémites.

J'ai cru comprendre qu'il s'agissait en réalité d'une émission humoristique, à prendre au deuxième degré. Ne le sachant pas, et écoutant cette émission, je suis tombé dans le piège et je n'ai certainement pas été le seul.

Cette émission est extrêmement dangereuse

Ce qui signifie que dans sa formule actuelle, cette émission est extrêmement dangereuse, et qu'elle risque d'alimenter les préjugés qu'elle envisage peut-être de combattre".

Ce n'est pas la première fois que cette émission, aujourd'hui bien installée dans la grille de France Inter -au point qu'elle est l'une des plus podcastée de la station- suscite des réactions. Mais c'est en revanche la première fois qu'une institution comme le CRIF réagit avec cette virulence. A aucun moment, semble-t-il, le président du CRIF n'a tenté de savoir quelle était la nature de ce programme.

Du côté de France Inter, en revanche, l'incompréhension est totale: cette réaction, au premier degré, face à une émission dite de divertissement laisse circonspect une station qui n'a pas pour l'heure officiellement répondu au CRIF, n'étant pas récipiendaire du courrier en question.

Depuis le 16 janvier 2012, un ovni radiophonique intitulé « A vôtre écoute, coûte que coûte », parodie d’émission de libre-antenne, fait un carton sur les ondes de France Inter, avec un humour cinglant qui ne plaît pas à tout le monde. En tout cas pas aux institutions juives françaises.

Cet énorme canular radiophonique, présenté par un couple de médecin et thérapeute « Philippe et Margarete de Beaulieu », que bien des français prennent pour de vrais animateurs, avec de « vrais » auditeurs qui interviendraient à l’antenne, a provoqué des réactions outrées de nombre d’institutions juives, à commencer par le Crif, à la suite d’un sketche intitulé « La femme qui hésitait à s’installer en Israël ».


Le principe de l’émission : un auditeur appelle les deux « thérapeutes » pour poser une question liée à un problème psychologique. Zabou Breitman et Laurent Lafitte, dont l’identité n’a évidemment pas été révélée officiellement par la radio, répondent alors en débitant les pires clichés racistes, réacs, sexistes, homophobes… Pour la plus grande joie des auditeurs qui se régalent de ces sketches, tandis que d’autres, piégés par les canulars, restent sous le choc (ou pas, selon leur degré de tolérance).


Dans le cas précis du sketch diffusé lundi 27 février, on se demande quelle mouche a bien pu piquer les responsables du Crif, qui selon nos informations, envisageraient, après une « enquête » (?) de porter plainte auprès du CSA. Dès hier, les sympathisants des institutions juives recevaient des mails expliquant : « vous réagirez j’en suis sûre avec la même véhémence que Richard Prasquier Président du CRIF… Jamais (ou il y a bien longtemps) autant de poncifs antisémites ont été émis en si peu de temps. » Bref, comme on dit sur Canal +, « J’ai écouté un sketch, j’ai pas compris que c’était un sketch, j’ai cru qu’on m’insultait, j’ai réagi ».


Il ne manquerait plus que l’Ambassade d’Israël s’y mette aussi, et l’on pourra applaudir des deux mains devant tant de bêtise contre-productive. Comment peut-on croire sérieusement qu’il faille se plaindre d’une parodie qui met en scène avec brio tous les poncifs antisionistes et antisémites, et que ces plaintes auront pour résultat d’améliorer l’image des Juifs français et d’Israël dans les médias ? Le Crif et les institutions juives qui le suivront dans cette démarche font tout le contraire, au risque de se ridiculiser. Et sans doute plus triste, ont totalement perdu le sens de l’humour.